Le programme

Voici notre programme en 5 points


L’université doit conserver sa dimension universelle et émancipatrice, respecter les disciplines et les territoires, rompre avec la défiance, renouer avec un fonctionnement démocratique et collégial.


Notre programme en PDF



Version courte

Version longue








1 - Rompre avec la concurrence généralisée pour une université de service public


  • • procéder à des recrutements sur statuts nationaux
  • • rompre avec la répartition budgétaire sous forme d’appels à projets
  • • rompre avec l’individualisation par les traitements et par les primes
  • • refuser les hausses des frais d'inscription et les frais différenciés pour les étudiant·es étranger·es
  • • intégrer l’I-SITE LUE dans le fonctionnement de l’université au service de tou·tes
  • • cesser de faire reposer les contraintes budgétaires mutualisables sur les composantes (participation aux fluides, améliorations du bâti, réparations, primes, CET, etc.).

Le principe de concurrence entre les personnes et entre les structures est devenu tellement présent dans la société qu'on en finit par penser qu'il s'agit de la façon normale de fonctionner, notamment à l'université qui multiplie les classements, les évaluations de toutes sortes et les appels à projets. Pourtant, nos principales missions sont de produire du savoir et de le transmettre. L’investissement financier concurrentiel détériore l’un et l’autre. Chacun·e, avant d'avoir participé à ces compétitions, peut se penser un·e potentiel·le gagnant·e de ce système. Le résultat est le développement de comportements individualistes et égoïstes, au détriment de l'intérêt commun. Le sous-investissement est tel que personne ne peut être un éternel gagnant. C'est le principe même de l'évaluation permanente et de la mise en concurrence : rien n'est jamais stable, la place qu'on a gagnée est toujours susceptible d'être perdue au classement suivant. Au lieu de stimuler l’intelligence, cette organisation casse les collectifs et les individus qui perdent leur enthousiasme et finissent parfois par se désinvestir des études, de l’enseignement ou de la recherche.

Pour nous, cesser la concurrence :
- C’est accepter que la science ne soit pas seulement le fait de quelques collègues qui auraient une immense visibilité, mais plus généralement le fait de femmes et d'hommes, au quotidien, qui font progresser la pensée humaine collectivement. Une façon d'instancier ce principe à l’université de Lorraine sera d'intégrer les financements exceptionnels type I-Site au bénéfice de toute la communauté.

- C’est cesser de fonctionner systématiquement sous forme d'appels à projets, qui sont très consommateurs de temps de cerveaux, tant pour la rédaction des projets que pour leur évaluation. À l’université de Lorraine, tous les conseils ou composantes y font appel, ce qui rend illisible la politique menée et met les personnels sous tension continue. Nous procéderons autrement, notamment par des financements récurrents.

- C’est respecter les statuts de la Fonction publique qui ont fait la force de l’université en France et son attractivité. À l’université de Lorraine, c’est refuser le recrutement de chaires de professeurs juniors, présentées aujourd'hui comme la seule solution pour augmenter le recrutement et l'attractivité du métier. Ces postes sont présentés comme des tremplins pour un petit nombre, mais dans la réalité c'est, pour beaucoup, l'allongement de l'insécurité, par la mise en concurrence avec les personnels déjà en place. De manière générale, il faut favoriser l’emploi de fonctionnaires plutôt que le recrutement de non-titulaires qui maintient les collègues dans la précarité.

- C’est avoir une considération égale pour tous les membres des collectifs de l'université. Il est nécessaire de minimiser la part des primes et de se battre pour améliorer le traitement indiciaire. À l'université de Lorraine, les primes doivent être mieux réparties entre collègues pour corriger les inégalités de traitement et de carrière.

- C’est refuser l'augmentation et la différenciation des frais d'inscription, car ils limiteraient l’accès à la formation aux plus fortuné·es. À l’université de Lorraine, c’est mettre tout en œuvre pour que les étudiant·es étranger·es paient les mêmes frais de scolarité minimums, sans distinction entre nationalités. C’est aussi accompagner un maximum d’étudiant·es dans la réussite de leur projet d'étude et dans l'amélioration de leur quotidien.

- C'est réorganiser le fonctionnement pour une plus grande équité entre les agent·es en ne faisant pas reposer le financement des primes ou du compte épargne temps sur les ressources propres des composantes. C'est donc cesser de faire porter les contraintes budgétaires sur les composantes, auxquelles on demande par exemple de financer les fluides. C'est organiser la gestion et l'entretien du bâti comme le partage des charges et des recettes de manière mutualisée au niveau de l'établissement.

Il est nécessaire de proposer une rupture profonde avec la manière dont l’université a été gérée ces dernières années tant au niveau local que national.

2 - Améliorer les conditions de travail et les conditions d'études


  • • revenir à un fonctionnement basé sur la confiance
  • • apporter une réponse institutionnelle à la question du harcèlement moral, sexiste et sexuel systémique qui concerne tous les personnels et les usager·es
  • • refuser la sélection, accueillir et accompagner le plus grand nombre d’étudiant·es, faire fonctionner l’université pour ses usager·es et non pour son administration et ses indicateurs
  • • réduire la précarité et la sous-traitance : titulariser ou stabiliser un maximum de personnels précaires, ouvrir les postes gelés et mener une politique de recrutement pour les enseignant·es, les enseignant·es-chercheur·ses et les BIATSS
  • • organiser le temps de travail et les modalités du (télé)-travail pour tou·tes en respectant la diversité des situations, faire appliquer le droit à la déconnexion
  • • respecter et suivre les recommandations du CHSCT et de l'instance qui lui succédera
  • • restaurer des services communs : action sociale, SUMMPS, SUAPS, vie des personnels…

Tous les acteurs de l’université font le constat d’une dégradation réelle des conditions de travail. Les injonctions administratives très éloignées de la réalité du terrain ont pris le pas sur l’organisation quotidienne. Cette dynamique entraîne une perte de sens pour toutes et tous. Le fonctionnement général donne le sentiment de voir une machine roulant à toute vitesse, sans savoir ni pourquoi ni vers où. Il est temps de redonner du temps à chaque acteur pour qu’il reprenne une place normale et raisonnable. Il est temps de combattre l’individualisme, la concurrence et leurs cortèges d’inefficacité, de violence et de souffrance au travail pour que les personnels de l’université de Lorraine retrouvent enfin des conditions de travail acceptables. Il est temps de redonner des conditions d'études satisfaisantes aux étudiant·es. Venir travailler comme étudier à l’université doit se faire avec la garantie du respect des personnes, et de leur travail.

Nous souhaitons améliorer les conditions de travail en commençant par avoir confiance dans le travail des différents acteurs. Nous avons collectivement à cœur de bien faire notre travail et il n’est pas besoin de le contrôler systématiquement. Le travail doit être un lieu permettant à toutes et tous de prendre sa place quelles que soient ses contraintes personnelles. Il doit permettre à chacun d’avoir une vraie perspective d’accompagnement dans l’évolution de sa carrière. Il s'agira de remettre au centre des conditions de travail la réappropriation de celui-ci par les agent·es, de le replacer dans le collectif, de cesser les changements permanents, d'arrêter la bureaucratisation : il n’est plus possible de continuer à faire agir dans une urgence permanente, source de stress. Nous stabiliserons les outils numériques utilisés afin de cesser les changements réguliers sources de désorganisation continue. Plutôt que de courir pour obtenir des labels d’excellence en ressources humaines, nous respecterons le travail de toutes et tous. Il conviendra d’arrêter l’excès de pouvoirs des petits chefs, des chefs et des grands chefs, certains pouvant se penser investis d’une mission qui leur conférerait une forme de pouvoir en particulier sur les personnels BIATSS.

Il faut s'emparer de la question du harcèlement moral, sexiste et sexuel systémique : nous travaillerons à la mise en place rapide de solutions pour que toutes les formes de harcèlement disparaissent. Le silence et l’inaction ne sont pas acceptables devant des situations dramatiques. Chacun et chacune a le droit de venir travailler et étudier en toute quiétude. Si la prise de conscience sur l'ampleur du harcèlement à l'université semble enfin apparaître, force est de constater qu'il y a très peu de saisines des dispositifs. Pourquoi, comment saisir l'administration, la direction d'un établissement, quand c'est précisément cette administration, avec sa direction, qui organise le système, qui fait perdurer les pratiques, qui enquête, juge et (peut-être) punit, dans l'entre-soi, entre pairs ? Nous aurons une nouvelle réflexion sur la question du harcèlement à l'université, avec tous les acteurs internes et externes concernés, nous relancerons des espaces de discussion, avec le CHSCT et les représentant.es du personnel et des étudiant.es, les collectifs ou associations. Nous ouvrirons (enfin) le débat autour des sections disciplinaires, des enquêtes administratives, de l'accompagnement des victimes et des témoins, de l'externalisation des dispositifs (cellule d'écoute, de traitement).

Un autre point important est l'organisation du temps et des modalités du (télé-)travail. Agatte (logiciel d'enregistrement du temps de travail) doit être un outil au service des personnels BIATSS. Au fil du mandat précédent, des dérives d'utilisation ont vu le jour : cet outil est devenu parfois un moyen de contraindre, de surveiller et d’administrer les personnels. Nous lancerons une nouvelle réflexion autour de la comptabilisation du temps de travail (mal nécessaire ?), en nous interrogeant sur les comportements individuels et/ou managériaux. Cette analyse nous permettra d'aborder aussi les questions de l'explosion du temps de travail, le burn-out, le droit à la déconnexion, tout en respectant la diversité des situations. Nous ferons, avec le CHSCT, un bilan annuel du télétravail (atouts, bienfaits, TMS, épuisement, stress, désorganisation, surcharge…) afin de revoir, le cas échéant, le cadre réglementaire du télétravail dans notre établissement.

La loi de transformation de la Fonction publique a augmenté les possibilités de recours aux contractuels et la direction de notre établissement s’en est saisie de suite. Par ailleurs, elle a mis en place une politique de gel puis de report de postes, et ceci pour pallier le manque de moyens accordés à notre université. Ce sont autant de jeunes docteur·es qui n’ont pas été recruté·es qui auraient pu ouvrir de nouvelles pistes de recherche, de personnels Biatss jetables sans perspectives, d'enseignant·es ou de chercheur·ses contractuel·les, de vacataires qui souvent comblent des manques de personnels au sein de l'université de Lorraine. Tous ces postes participent à la précarisation de notre université, il est temps d'en finir. Nous devons revenir sur cette politique, ce qui implique de recruter massivement des personnels titularisés (enseignant·es, enseignant·es-chercheur·ses, administratifs et techniques), et de réduire au minimum le recours aux vacataires et aux contractuels, en pérénisant l'emploi des agent·es déjà en poste et en nous attachant à l'égalité professionnelle femmes/hommes dans tous les métiers de l'université. Nous modifierons les règlements de gestion des enseignant·es et des chercheur·ses contractuel·les pour améliorer leur situation et nous les accompagnerons vers la titularisation. Nous redéfinirons le recours aux entreprises de sous-traitance, qui est une solution coûteuse, inefficace et difficile pour les travailleur·ses. Il est urgent d’intégrer ces personnels au sein de notre établissement par une vaste campagne de titularisation.

Le dialogue social, c'est de la négociation, de la consultation et des échanges, en amont, sur les règles ou consignes que l’administration envisage d’adopter en matière de santé et de sécurité. Les CT et CHSCT sont les instances de ce dialogue social. Dans le cadre des mandats précédents, ils ont été réunis dans le respect des textes mais il a été fait peu cas de leurs propositions et de leurs avis. Nous respecterons et suivrons les préconisations du CHSCT et tiendrons compte des avis du CT, et des instances qui leur succéderont. Nous utiliserons les compétences présentes dans l’établissement sur les dossiers relevant des conditions de travail.

Le service commun de l’action sociale et de la vie des personnels a été supprimé dans le cadre des mandatures précédentes. Pourtant il avait toute sa place dans la vie de l’établissement. Nous voulons la lui redonner en créant un véritable service pour les personnels : social, loisirs, etc. avec un budget dédié et gravé dans le budget de l’établissement. Parmi les améliorations nous souhaitons, par exemple, que notre établissement se dote, à nouveau de places de crèches. Ce dispositif serait un atout dans l’attrait que peut présenter notre établissement pour le recrutement de jeunes collègues mais il entre également parfaitement dans le cadre de l’égalité femmes/hommes. Nous porterons également une politique culturelle ambitieuse pour toutes et tous.

De Parcoursup à la plateforme TrouverMonMaster (TMM), tout concourt à généraliser la sélection à l’université. Pourtant, nous devons soutenir la démocratisation de l’enseignement supérieur afin de permettre à tous et toutes, en particulier aux enfants issus des milieux les plus modestes, d’accéder aux diplômes et aux qualifications du supérieur dans des conditions d'études décentes. Il est nécessaire de permettre à chaque jeune de s'épanouir dans la formation qu'il ou elle souhaite. Nous voulons une université qui favorise largement l’accès à tous les cursus universitaires, en licence comme en master, parce que la société en a besoin. L’insertion professionnelle ou la « capacité du marché du travail » à accueillir des diplômé·es ne doit pas contraindre l'orientation des étudiant·es et la définition de l'offre de formation. L’université doit conserver sa dimension universelle et émancipatrice. Nous organiserons le déploiement des budgets et des postes nécessaires à une augmentation des capacités d'accueil et à l'amélioration des conditions d'études à l'université de Lorraine. Nous refuserons l'assujettissement aux variables budgétaires et aux injonctions des classements d'excellence.

Les conditions de travail concernent tout autant le temps que l'espace dans lequel nous partageons au quotidien l’enseignement, l’administratif et la recherche. Le manque d'espace pour offrir de meilleures conditions de travail est une évidence à l'université de Lorraine. L'espace n'a jamais été conçu, élaboré, bâti collectivement mais plutôt imposé par des budgets configurés a minima par l'État et les collectivités, et par une gestion managériale. Certains bureaux sont abandonnés l'été parce que leur mauvaise isolation ne permet plus d'y travailler, des bâtiments sont sinistrés par le manque d'isolation sonore, les doctorant·es manquent de lieux de travail. Certains bâtiments sont très dégradés, à la limite de l'insalubrité. Il sera nécessaire d'interroger l'ensemble des acteurs de l'université pour dessiner ensemble le projet d'une architecture au service de la recherche et de l'enseignement.

3 - Remettre les libertés académiques et la connaissance au centre de l’université


  • • renforcer l'élaboration et la transmission des savoirs disciplinaires et interdisciplinaires, rejeter l'idéologie de l'approche par compétences
  • • refuser les évaluations chronophages et bureaucratiques du type HCERES qui se résument à des indicateurs et tournent le dos à la science
  • • rendre du temps aux personnels et réconcilier les missions d’enseignement et de recherche
  • • respecter les spécificités disciplinaires et cesser de déployer un modèle unique, travailler à la reconnaissance des CNU dans l’organisation de la recherche
  • • maintenir le recours aux instances nationales (qualification, congés de recherche, promotion... des enseignant·es-chercheur·ses, concours BIATSS)
  • • respecter les franchises universitaires

L’université doit mettre en son centre les enjeux de la connaissance et non ceux de la gestion administrative. Une illustration parfaite est le découpage arbitraire entre enseignement et recherche. Entre les deux missions phares de l’Université, le système actuel pousse chaque individu à choisir. Et dans les prises de décision, il nous faut parfois argumenter contre nous-mêmes avec l’une ou l’autre de nos casquettes. Ce n’est pas une organisation technique plutôt qu’une autre qui apportera une solution au problème, mais bien une transformation radicale du fonctionnement de l’université. Notre seule contrainte doit être celle du développement et de la transmission de la connaissance. Nous proposerons une réorganisation prenant en compte ces deux aspects pour ne pas déléguer sur les individus la complexité de l’organisation.

Un autre triste exemple est la nouvelle évaluation de l’HCERES. L’installation du nouveau président de la haute autorité est symptomatique des dérives de nos universités. Conseiller du Président Macron et organisateur d’un programme de libéralisation de l’enseignement supérieur, son installation a été imposée contre la volonté de la communauté scientifique. Si nous étions déjà contre le principe de l’évaluation-sanction de l’HCERES, les nouvelles procédures sont encore plus décorrélées de la réalité du travail scientifique. Seuls des dizaines d’indicateurs seront utilisés, sans appui sur un projet scientifique, par un panel qui ne visitera pas les acteurs, et qui aura en charge une même thématique sur tous les établissements de la même vague. Autant dire, moins de science et plus de "Darwinisme", pour aller dans le sens de ce qu’a pu préconiser le président du CNRS. À cette évaluation néo-managériale nous opposons l’évaluation par les pairs, garante de l’indépendance de la recherche et de l’enseignement supérieur depuis des décennies dans nombre de pays. Appelons-en aux CNU et CoNRS et cessons toute forme de coopération avec l’HCERES.

Fonder son organisation sur la connaissance, c’est aussi accepter que les disciplines n’aient pas toutes les mêmes fonctionnements, sans qu’il ne soit question de construire une hiérarchie de valeurs entre elles. Nous avons trop vu le mode de fonctionnement d’un secteur disciplinaire appliqué à d’autres sans que cela n’ait de fondement. Les pratiques et les fréquences de publications ne sont pas comparables, comme le temps nécessaire à la construction d’une recherche. Il nous faut garantir la diversité des pratiques et des cultures disciplinaires. L'université doit également rester garante de la transmission des savoirs, ce qui suppose d'assumer de former les étudiant·es aux méthodes et contenus disciplinaires, plutôt que de fondre les enseignements dans un magma de compétences avec pour seule finalité leur affichage dans des port-folios.

Et pour respecter les disciplines il faut commencer par respecter les individus en leur assurant la possibilité de travailler, par exemple en facilitant les affiliations dans les laboratoires, ce qui ne se fait pas toujours aisément, et en rendant du temps pour penser. Dans certains secteurs, les collègues ne peuvent pas envisager sereinement de prendre un CRCT pour cause de surcharge du côté enseignement. Comment parvenir à tout mener de front dans ces conditions ? Nous travaillerons à la création de postes dans les secteurs en tension. Le temps est devenu trop rare et nous nous sommes toutes et tous organisé·es pour pallier ce manque chronique. Mais ce n’est pas aux individus d’adapter leur temps de travail ou leur carrière, c’est à l’institution de leur rendre ce temps.

Les transformations de l’enseignement supérieur et de la recherche de ces dernières années nous font oublier qu’à l’Université nous avons sinon le devoir, au moins le droit de nous exprimer. Ce droit a été attaqué notamment par la ministre Vidal, qui a par exemple traité certain·es collègues d’« islamo-gauchistes ». Avant cela, elle nous avait intimé l’ordre de ne pas critiquer le gouvernement, comme le ministre de l’Éducation nationale avait osé le faire sur son périmètre. Cette vision qui exige le respect des ordres se place en dehors du fonctionnement académique normal basé sur la disputatio. Nous serons une présidence assurant le respect de ses personnels. Par ailleurs, nous garantirons les franchises académiques (qui interdisent l'accès des campus aux forces de l'ordre) et la liberté d’expression.

Les présidents d’universités, rassemblés dans différents clubs entre les universités rentables et efficaces pour le ministère et les autres, opèrent un lobbying très actif contre tout ce qui pourrait aller contre leurs prérogatives, pour ne pas dire leurs pouvoirs. Quelle meilleure illustration de cela que de voir les décisions supprimant des prérogatives au CNU ! Fin de la qualification des maîtres de conférences habilités, projet de suppression du contingent des promotions dès 2023… Sans CNU, les décisions reviennent exclusivement au président de l’université. Sans oublier les cas de dysfonctionnements de tel CNU ou de telle procédure, il n’en reste pas moins que sans CNU, il n’y a plus aucun contrepouvoir pour les exécutifs locaux. Il en est de même avec les commissions paritaires d'établissement, académiques ou nationales pour les personnels Biatss, qui constituaient un contrepouvoir au possible arbitraire de la hiérarchie. Nous soutiendrons l’organisation des disciplines au niveau national pour un maillage de tout le pays. Nous ferons autant que possible appel à ces instances pour laisser vivre une autre vision disciplinaire que celle portée localement.

4 - Démocratiser le fonctionnement de l’université de lorraine


  • • sortir du statut de grand établissement pour que l'université de Lorraine devienne une université
  • • dans l’attente : travailler à la réécriture du décret pour réviser la composition des conseils centraux (diminuer les extérieurs et augmenter la représentativité des personnels) et créer des contre-pouvoirs au CA notamment un Conseil Académique
  • • immédiatement : utiliser le sénat académique comme instance d'orientation de la politique de l’établissement
  • • ne pas laisser le ou la président·e seul·e décisionnaire des orientations politiques ; décentraliser les prises de décision : responsabilité fonctionnelle aux directeurs et directrices de pôles scientifiques et de collégiums, prérogatives pour les conseils de composante et laboratoire
  • • assurer la représentativité des territoires, notamment l'équilibre entre les sites de Nancy et de Metz, et des secteurs disciplinaires, tant dans les instances qu'aux postes de décision
  • • respecter les avis des conseils consultatifs (CS, CF, CVU, Sénat Académique) et des instances représentatives des personnels (CT, CHSCT puis les instances qui leur succéderont), repenser les prérogatives des CPE (avancement des personnels BIATSS)
  • • assurer la transparence de la vie académique : budget, CR des conseils (centraux et composantes), accessibilité des données numériques de l'université (bilan social, budget, observatoire de la vie étudiante...).

Nous ne serons pas une présidence de témoignage ni de co-gestion avec le ministère. Nous nous attèlerons au plus gros chantier que l’université de Lorraine doit connaître, celui de sa démocratisation. À l’heure où nous nous présentons, l’établissement ne connaît qu’une démocratie de façade. Nous en avons la preuve avec le calamiteux dossier de la filiale de l'université qui a fait l'unanimité contre lui dans les différents conseils, mais que le président, à lui seul, a imposé à l'agenda de son CA. Cette instance n’a jamais osé le mettre en défaut, restant une chambre d’enregistrement des décisions de l’équipe du président.

Remettre de la démocratie dans l’université de Lorraine doit se faire en deux temps, dès à présent avec la structure telle qu’elle existe, puis par la réécriture du décret statutaire de création de l’établissement. Cette dernière étape nécessite une concertation longue et un travail avec le ministère. Donc avant d’écrire statutairement la nécessité de respecter un fonctionnement démocratique, nous développerons une transformation des pratiques.

La première est de garantir qu’aucune décision ne sera présentée en CA et prise par l’Université contre l’avis unanime des conseils centraux ainsi que les conseils représentatifs des personnels. Fonctionner démocratiquement, c’est respecter l’expression des conseils.

La seconde est de donner au Sénat Académique un rôle de parlement où les oppositions peuvent s’organiser et faire entendre leurs voix, et surtout où toutes les problématiques de l’université sont considérées en même temps, tant administrative, d’enseignement que de recherche. Possible contre-pouvoir, il sera convoqué très régulièrement et sera le lieu du débat, au lieu de n’être qu’un maillon dans les conseils centraux, réuni deux fois l’an pour des présentations techniques et unilatérales.

La troisième est de décentraliser les lieux de décision. Cela commence par donner un rôle plus important aux directeurs et directrices de pôles et de collégiums. En effet, il s’agit des responsables sur des secteurs bien définis qui sont au plus près des unités de recherche et des composantes d’enseignement. Leur fonction ne doit pas se cantonner à être une courroie de transmission de décisions du directoire, mais ils et elles doivent porter les politiques menées et relayer l’expression de leur conseil. Par ailleurs, pour réconcilier les problématiques d’enseignement et de recherche, il est nécessaire de les faire travailler de concert. Ce mouvement de décentralisation ne doit pas s’arrêter à ce niveau et l’expression des conseils de composantes d’enseignement et d’unité de recherche doit prendre une part active dans l’animation de l’établissement.

Respecter la démocratie implique de donner les moyens de suivre et mesurer l'activité de l'établissement. Il faut pour cela partager les informations, les documents administratifs, comme les comptes rendus des conseils, leurs ordres du jour, les éléments budgétaires tant au niveau global de l'université que des composantes. Il est nécessaire que les données comme les décisions soient accessibles pour être comprises et non subies. Collecter et diffuser ces informations a un coût mais c'est celui de la transparence.

Le président ou la présidente de l'université doit en être le ou la représentant·e. Cela implique de remonter l'expression des personnels auprès du ministère et non l'inverse. Pour cela il doit rester accessible et au contact du terrain.

5 - S'engager dans les transformations de la société


  • • faire reconnaître la place de l’Université, du savoir et des sciences dans la société
  • • défendre les libertés démocratiques et collectives, contribuer à la formation critique et émancipatrice des citoyen·nes-travailleur·ses
  • • lutter à tous les niveaux contre le dérèglement climatique
  • • participer à la science ouverte : développer la publication ouverte, la publication des jeux de données et mettre en place une architecture pour l’animation et la publication de revues en ligne, déployer et utiliser des logiciels libres

L‘université n’est pas un îlot en dehors du monde. Elle doit s’engager résolument pour initier et accompagner les grandes mutations que notre société devra réaliser. Pour cela, elle doit impérativement réhabiliter au cœur de sa pratique le rôle majeur de développement d’une pensée critique et réflexive : produite par celles et ceux qui fabriquent la science d’une part, garantie dans les objectifs de formation de celles et ceux qu’elle a mission d’émanciper et de conduire à l’exercice d’une citoyenneté éclairée, d’autre part. Pour cela, il est indispensable de remodeler un enseignement supérieur qui soit notamment à la hauteur des enjeux environnementaux, de santé, d'égalité femmes/hommes, d'inégalités sociales...

Il nous faut ainsi constater que le climat change et que la planète est déréglée. Certain·es d’entre nous ont décidé d’en faire la problématique de leurs recherches, mais cela doit nous interroger collectivement. Nous devons dès à présent questionner nos pratiques professionnelles pour minimiser leur impact environnemental (problématique des déplacements, de la consommation de biens pour l’exercice de nos missions). Notre université doit par ailleurs décider d’une politique plus déterminée, en partenariat avec l’État et les collectivités territoriales, pour rénover et réhabiliter ses locaux aux plus hauts niveaux des standards d’économie énergétique, des basses consommations, et de qualité de l’air, dans un souci d’anticipation d’autres crises sanitaires. Un programme ambitieux sur cette question doit être largement fédérateur. Une opportunité s’ouvre pour repenser l’intégration de l’université dans les villes, son intrication plus étroite au sein de la cité (bibliothèques et médiathèques - espaces de conférences, de spectacles, de vie étudiante – tiers-lieux intégration de services aux usagers partagés avec les habitantes et les habitants, comme les crèches, les points de distribution d’alimentation saine et locale, les services de santé…)

L’université de Lorraine s’engagera aux côtés des réseaux nationaux et européens déjà bien constitués de sciences-citoyennes pour accompagner cette transition. Il s’agira de promouvoir de grandes alternatives avec des programmes de recherche orientés vers un « Horizon Terre » plutôt qu’un « Horizon Europe » qui ne fait qu’appuyer sur l’accélérateur d’un néolibéralisme maintenant aux abois, cherchant son salut dans un solutionnisme technologique débridé, et l’appui d’une communauté académique mise au pas par le fléchage des ressources.

Si nous voulons l’indépendance de penser tant pour les universitaires et les étudiant·es que pour les citoyen·nes, nous œuvrerons au développement de pratiques scientifiques plus indépendantes des logiques marchandes. Nous poursuivrons et accompagnerons le mouvement de la science ouverte qui d’une part soutient la publication en accès libre, et d’autre part promeut une science accessible et partagée. Derrière les principes politiques, il nous faut soutenir des infrastructures techniques, en lien avec les plateformes nationales et le service de documentation de l’université de Lorraine, porter les initiatives éditoriales locales, les mettre en réseau avec les presses universitaires nationales et au plan européen, et accompagner toute apparition de pratiques audacieuses sur ce sujet. Nous porterons également l’utilisation à grande échelle de logiciels libres.

Notre programme d’actions aura ce grand mérite de mettre notre université sur la voie d’un changement radical, qui allie son système de valeurs aux attentes citoyennes en matière de transformations de notre société.